La crise sanitaire mondiale liée à l'épidémie de la Covid-19 et le confinement imposé en France pour limiter la propagation du coronavirus ont mis à l'arrêt des pans entiers de l'économie. L'immobilier et la construction n'y ont pas échappé. Si l'activité économique a progressivement repris depuis le déconfinement du 11 mai 2020, la situation des chantiers de construction et celle du marché immobilier francilien restent incertaines.
Construction et immobilier, des secteurs très dynamiques avant la crise sanitaire
Avant l'épidémie de coronavirus, l'Île-de-France connaissait un dynamisme exceptionnel en matière de constructions et de transactions immobilières. Les travaux pour le Grand Paris Express s'accéléraient en vue des JO de 2024 et le marché de l'immobilier francilien, porté par ce projet ambitieux et des taux d'intérêt historiquement bas, misait sur une année exceptionnelle en termes de nombre de ventes.
Le chantier ambitieux du Grand Paris Express
Dans le cadre du projet du Grand Paris, annoncé en 2007 pour transformer la région parisienne en une véritable métropole mondiale, le développement du réseau des transports en commun s'est avéré indispensable. Pour y parvenir, le projet de Grand Paris Express (GPE) a été mis en place. Réalisé par la Société du Grand Paris, celui-ci a pour objectif d'améliorer le cadre de vie des habitants en facilitant leur circulation dans la région. Il comprend :
- la création de 200 kilomètres de lignes automatiques (qui feront le tour de l'agglomération parisienne) ;
- le prolongement de la ligne 14 au nord et au sud ;
- la création de 4 nouvelles lignes de métro : 15, 16, 17 et 18 ;
- la création de 68 nouvelles gares.
La livraison définitive du GPE était prévue pour 2030.
Notez qu'avec l'attribution des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 à Paris, certains tronçons du GPE devaient être terminés d’ici l’événement afin d'optimiser les déplacements des athlètes, des accompagnateurs et des spectateurs. Il s'agissait des métros se trouvant autour des communes de Saint-Denis, Saint-Ouen et de l'Île-Saint-Denis, qui accueilleront le village olympique et paralympique. Le prolongement nord de la ligne 14, la ligne 16 et la ligne 17 étaient concernés par ces délais de livraison réduits qui ne laissaient que peu de marge de manœuvre.
Le projet du Grand Paris a eu un impact sur tout le marché immobilier francilien. La perspective d'avoir des transports en commun à proximité a augmenté l'attractivité de la majorité des villes accueillant l'une des futures gares.
Un marché immobilier très dynamique en Île-de-France
À l’approche de cette réorganisation de l’Île-de-France, des projets de construction immobilière ont été lancés et les investisseurs, tout comme les ménages parisiens, ont été attirés par les prix des logements plus abordables que ceux pratiqués à Paris. Alors que la demande de biens immobiliers a fortement augmenté, les prix dans ces villes continuaient leur hausse. Malgré cette dernière, le marché en Île-de-France est resté très dynamique, soutenu par une demande en logements supérieure à l'offre et par des taux de crédit immobilier bas. Les transactions immobilières tout comme les prix étaient alors en pleine croissance, selon les notaires du Grand Paris.
D'ailleurs, en janvier 2020, les prix de l'immobilier dans la capitale dépassaient les 10 000 € / m². En parallèle, au dernier trimestre 2019, les villes des futures gares du Grand Paris comme Saint-Ouen ou Saint-Denis, profitaient également d'une hausse de leur prix immobilier de 14,2 % et 3 % respectivement sur 1 an. Malgré ces prix en constante augmentation, le marché francilien se portait bien avant la crise sanitaire. Les agences immobilières comme les notaires envisageaient une année record quant au nombre de transactions.
Le confinement, un coup d'arrêt pour tous les projets
Alors que l'épidémie de Covid-19 prenait de l'ampleur dans le monde entier, la France a été confinée du 17 mars au 11 mai 2020. Ce confinement a eu des conséquences importantes dans la plupart des secteurs économiques.
Le secteur de la construction à l'arrêt
Si le confinement mis en place en France permettait les déplacements pour des raisons professionnelles, les chantiers de construction immobilière et celui du Grand Paris Express ont, pour la plupart, été obligés de stopper temporairement leur activité pour plusieurs raisons :
- mise en place des mesures sanitaires (hygiène, distanciation sociale, etc.) ;
- difficulté d'approvisionnement en matériaux du fait des problèmes de livraison et de la fermeture des entreprises de production ;
- absence de personnel.
Si les études, les appels d'offres et l'analyse des marchés ont pu se poursuivre en télétravail, les travaux de construction ont dû s'arrêter (seule la maintenance du matériel étant assurée). Les chantiers du Grand Paris Express ont progressivement repris à partir du 20 avril 2020 dans le respect des dispositions du protocole sanitaire élaboré par l'organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP). Cette reprise n'a cependant été que partielle du fait du manque de personnel et de matériaux.
Des transactions immobilières stoppées
Qu'il s'agisse de louer ou d'acheter un bien, difficile de se décider sans pouvoir visiter le logement convoité. Le confinement a donc été un coup d'arrêt pour l'activité des agences immobilières, privées de visites et donc de transactions. Les notaires également ont vu leur activité immobilière fortement dégradée du fait de l'impossibilité de se déplacer. Des compromis et des actes de vente n'ont pas pu être signés dans les délais impartis par la loi du fait du confinement. Pour répondre à ces situations particulières, plusieurs textes sont venus adaptés les règles en vigueur :
- L'article 4 de l'ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 a permis de suspendre les clauses de déchéance présentes dans les compromis de vente et qui prévoyaient que l'acte définitif de vente devait être signé entre le 12 mars et le 23 juin 2020.
- Le décret n°2020-395 pris par le Premier ministre le 3 avril 2020 a permis d'établir un acte de vente notarié sur support électronique sans que les parties ne soient présentes.
Le déconfinement, entre reprise et incertitudes
Comme l'avait annoncé le Premier ministre en poste Edouard Philippe, la France a progressivement été déconfinée à partir du 11 mai 2020. Les déplacements restaient cependant limités et des restrictions étaient maintenues dans les régions classées rouge comme l'Île-de-France. Si la reprise est amorcée, plusieurs mois risquent d'être nécessaires pour retrouver un « rythme de croisière ».
Des retards inéluctables pour les chantiers
Pour les chantiers du Grand Paris, l'heure est au calcul des surcoûts et des délais de retard. Les travaux ont repris un peu avant la fin du confinement mais pas avec la même productivité. Ainsi, alors que les retards ne faisaient aucun doute, la crainte concernait surtout les travaux pour les JO de 2024, les délais initialement prévus étant déjà serrés avant l'épidémie de Covid. Les tronçons du Grand Paris Express devant être livrés en 2024 étaient :
- l'extension de la ligne 14 vers le nord pour desservir le village olympique à la gare Saint-Denis Pleyel ;
- la création de la ligne 16 ;
- la création de la ligne 17 qui devait notamment desservir la gare Saint-Denis Pleyel, l'aéroport Charles de Gaulle et l'aéroport Le Bourget.
Le 22 juin 2020 le gouvernement a annoncé que les lignes 16 et 17 ne seraient pas prêtes pour 2024, mais que l'extension de la ligne 14 serait assurée. Thierry Dallard, président du directoire de la Société du Grand Paris, a confirmé ces propos dans un communiqué du 7 juillet 2020. Il a précisé que pour les tronçons en travaux des retards de 3 à 8 mois étaient à prévoir. Pour ceux encore en phase d'étude, des retards de 3 à 4 mois étaient envisagés. Les conséquences restent toutefois difficiles à appréhender dans leur globalité. Au-delà de l'arrêt des travaux, la crise sanitaire a entraîné une diminution de la productivité sur les chantiers du fait des mesures sanitaires. Le confinement a également imposé d'établir de nouveaux plannings autour desquels il faut coordonner tous les intervenants des chantiers. Enfin, le risque est grand que certains sous-traitants, dont les entreprises plus fragiles, cessent leur activité ; il sera alors nécessaire de trouver de nouveaux partenaires, avec les délais que cela impose. Le surcoût engendré par les retards, le protocole sanitaire et la gestion de cette nouvelle organisation, reste lui aussi difficilement chiffrable.
Une reprise de plus belle pour l'immobilier
Le déconfinement a eu un effet particulièrement rapide sur le marché immobilier. Alors que ce secteur était resté figé pendant 2 mois, les chiffres enregistrés dès le mois de juin semblent montrer que les transactions immobilières reprennent de plus belle. Simple effet de rattrapage des 2 mois d'arrêt ou véritable dynamique durable ? Il est encore trop tôt pour le dire. Alors que certains prédisaient une baisse des ventes et un ralentissement de la hausse des prix immobiliers dans la capitale, depuis la fin du confinement, les transactions ont repris sur un rythme aussi soutenu qu'en 2019 et au début de l'année 2020. Soutenus par des taux de crédit immobilier toujours bas, les ménages continus d'acheter. Seuls les investisseurs dans la location saisonnière semblent délaisser le marché. Il est cependant fort à craindre que l'impact de la crise économique sur l'emploi et le pouvoir d'achat aura des conséquences sur le marché de l'immobilier francilien, mais là encore les incertitudes demeurent.
Le blog Ooinvestir s’est penché pour vous sur les perspectives du marché immobilier pour la rentrée